Mode responsable : Retour sur une journée inspirante aux halles créatives de Nantes
25.11.25Désirabilité, éco-conception et nouvelles tendances : découvrez les insights clés d’une journée dédiée à l’avenir de la mode durable.
Introduction : Quand la mode responsable devient incontournable
Cet article résume une journée riche en rencontres et échanges au RDV de la Mode responsable à Nantes, enrichi de recherches complémentaires et d’exemples pour approfondir les thématiques abordées.
Le secteur de la mode vit une transformation profonde. Le marché de la mode éthique connaît une croissance annuelle de 8% et devrait atteindre 11,12 milliards de dollars d’ici 2027. Cette évolution témoigne d’un changement majeur dans les attentes des consommateurs et les pratiques des marques.
C’est dans ce contexte qu’Écho Positif a assisté au RDV de la Mode responsable organisé aux Halles 1&2 de Nantes. Une journée riche en rencontres, débats et perspectives qui a permis d’explorer les enjeux actuels d’une industrie en pleine mutation.
Dès l’ouverture, un défilé a donné le ton : la mode responsable n’est plus synonyme de compromis esthétique, mais bien d’innovation créative à base de matériaux upcyclés et sourcés auprès des acteurs du réemploi.
La Désirabilité : nouveau paradigme de la mode responsable
L’émotion au cœur de la décision d’achat
Le fil rouge de cette journée ? La désirabilité comme véritable moteur du comportement des consommateurs. Aujourd’hui, les marques s’adressent de plus en plus à la dimension émotionnelle plutôt qu’au discours purement rationnel sur l’éco-responsabilité.
Pour que les comportements changent durablement, ils doivent être désirables. Cette approche pour créer un lien émotionnel fort entre le produit et le consommateur peut s’appuyer sur le storytelling et les neurosciences.
Et si le neuromarketing se mettait au service de la mode durable
Le neuromarketing représente un changement de paradigme dans la compréhension du comportement des consommateurs. Cette discipline fusionne neurosciences et marketing pour identifier les leviers émotionnels qui influencent les décisions d’achat.
Selon plusieurs études en neuromarketing, 95% des décisions d’achat se font de manière inconsciente. Les recherches montrent également que la publicité émotionnelle augmente l’efficacité des ventes d’au moins 23%.
Dans le secteur de la mode responsable, cette approche permet de dépasser le simple argument écologique pour créer une véritable envie. L’enjeu n’est plus de convaincre par la culpabilité, mais de séduire par l’émotion et l’expérience.
Éco-conception : entre réglementations et innovation
Nouvelles exigences européennes
Philippe Schiesser, Directeur d’Ecoeff Lab, a mis en lumière l’importance croissante de l’éco-conception face aux nouvelles réglementations européennes. En décembre 2023, le Parlement européen et les États membres ont conclu un accord historique pour interdire la destruction des vêtements neufs invendus et renforcer l’écoconception des produits de consommation. Cette interdiction prendra effet deux ans après l’entrée en vigueur de la loi (soit en juillet 2026), avec un délai de six ans pour les moyennes entreprises.
La jungle des labels
L’un des défis majeurs pour le consommateur reste la multiplicité des labels et organismes certifiants. Difficile de s’y retrouver et de comparer objectivement les produits. C’est dans ce contexte que le concept de coût par usage devient pertinent : plutôt que de se focaliser uniquement sur le prix d’achat, il s’agit d’évaluer le coût réel sur toute la durée de vie du produit textile. Cette notion a été illustrer grâce à la vie d’un tee-shirt.
Cette approche rejoint celle du TCO (Total Cost of Ownership) appliqué aux équipements industriels, permettant une vision plus complète de la valeur d’un produit. Voir notre post linkedin à ce sujet
La difficulté à tracer la fibre du champ au produit fini
Les matériaux éco-responsables représentent l’avenir de la mode durable. Le coton biologique s’imposent comme des fibres privilégiées, même si leur production reste exigeante en ressources – jusqu’à 20 000 litres d’eau sont nécessaires pour produire un seul kilogramme de coton.
Table ronde RSE : de l’engagement à l’action concrète
L’Éco-responsabilité, un pré-requis désormais
La table ronde animée par Clément Gourlaouen (Mode Grand Ouest) a réuni des acteurs engagés de la mode responsable : Antoine Waret (ADEME Pays de la Loire), Nicolas Rohr (co-fondateur de Faguo) et Kévin Gougeon (CEO associé chez N’GO Shoes).
Le message clé ? L’éco-responsabilité n’est plus une fin en soi, mais un pré-requis. Les consommateurs l’attendent désormais comme une norme de base. Le véritable défi pour les marques est de créer de la désirabilité et de mobiliser leurs équipes vers des objectifs bas carbone concrets.
Au-delà du discours, l’action
Tous les principaux acteurs de l’industrie devront travailler main dans la main pour réussir cette transition. Il ne s’agit plus de communication, mais d’actions mesurables et vérifiables.
Les intervenants ont partagé des retours d’expérience concrets sur :
- La façon de mobiliser les équipes en interne
- Les méthodes pour atteindre des objectifs de réduction carbone
- L’importance de la transparence dans la chaîne d’approvisionnement
Les Enjeux sociaux de la transition
Environ 93% des marques de mode mondiale ne versent actuellement pas de salaire décent aux travailleurs de l’industrie textile. Une transition écologique ne saurait être réussie sans intégrer le bien-être des travailleurs dans l’équation. La mode responsable doit être aussi sociale qu’environnementale. (Source Industriel.net (2024))
Nouvelles tendances : la mode en (R)évolution
Digitalisation et circularité
Thibaut Ledunois, Directeur de l’entrepreneuriat et de l’innovation à la Fédération Française du Prêt-à-Porter Féminin, a exploré les grandes tendances qui façonnent l’avenir de la mode à retrouver dans #2flair :
La digitalisation transforme l’expérience client avec des essayages virtuels et des expériences immersives qui visent a réduire les retours et le gaspillage. Un « tracking » du client pour lui proposer une expérience personnalisée mais surtout in-fine afin de favoriser l’achat un peu comme un CRM(custom relationship management) en B2B…
La personnalisation devient un axe majeur, permettant aux consommateurs de créer des pièces uniques qui correspondent exactement à leurs attentes, réduisant ainsi le risque d’achat impulsif et de non-utilisation.
L’intelligence artificielle générative un sujet incontournable pour comprendre comment la technologie transforme la création et la production dans la mode.
Une tendance surprenante : Le « twinning » avec les animaux de compagnie
Une tendance émergente a particulièrement retenu l’attention : celle d’habiller son animal de compagnie à l’image de son propre style vestimentaire. Ce phénomène, qu’on appelle le « twinning », est à mettre en parallèle avec des évolutions sociétales profondes.
Par exemple en Corée du Sud, le taux de fécondité est tombé à 0,78 enfant par femme, l’un des plus bas au monde. Dans ce pays, il s’est vendu pour la deuxième année consécutive davantage de poussettes pour chiens que de poussettes pour bébé…
Cette tendance reflète un phénomène de substitution où les animaux de compagnie occupent une place émotionnelle similaire à celle d’un enfant ou d’un partenaire. On observe des dynamiques comparables aux États-Unis et dans d’autres pays occidentaux, ouvrant de nouveaux marchés pour l’industrie de la mode.
Slow fashion et minimalisme
La slow fashion et le minimalisme sont des mouvements qui prônent l’abandon de la fast fashion et encouragent les consommateurs à adopter une approche plus réfléchie et durable de l’habillement.
Ces tendances continuent de gagner en popularité, les consommateurs privilégiant la qualité à la quantité. L’accent est mis sur :
- L’investissement dans des pièces intemporelles
- La réparation et l’entretien des vêtements
- La location de vêtements pour des occasions spéciales
- La customisation et la personnalisation
Un défilé étudiant inspirant pour clôturer la journée
La journée s’est achevée en beauté avec un défilé responsable signé par les étudiants de l’Atelier Chardon Savard. Cette présentation a démontré avec brio que créativité et durabilité ne sont pas antinomiques.
Les futures générations de créateurs prouvent qu’il est possible de concevoir des collections désirables tout en respectant des contraintes environnementales strictes. C’est l’illustration parfaite que la mode responsable est l’avenir, non l’exception.
Conclusion : vers une mode responsable et désirable
Cette journée aux Halles de Nantes a confirmé que la mode responsable n’est plus une niche, mais bien le futur de l’industrie. Les enseignements clés à retenir :
- La désirabilité est le nouveau moteur : L’éco-responsabilité ne suffit plus à elle seule, elle doit être accompagnée d’une dimension émotionnelle forte
- L’éco-conception devient la norme : Face aux réglementations européennes, les marques n’ont plus le choix que d’innover
- La transparence est essentielle : Les consommateurs exigent de savoir d’où viennent leurs vêtements et dans quelles conditions ils sont produits
- L’innovation est partout : Des nouveaux matériaux à l’IA générative, en passant par la seconde main digitalisée
- La collaboration est cruciale : Aucun acteur seul ne peut transformer l’industrie, c’est un effort collectif
Merci encore à la Samoa, Nantes métropole et Mode Grand Ouest pour l organisation de cet événement